Entre occupation du Haut-Empire et du Moyen Âge sous le Monument aux Morts de Villeneuve d'Ascq : la limite d'enceinte du domaine carolingien

Abstract

Le projet de translation du Monument aux Morts positionné aux abords de la place de la République à Villeneuved’Ascq (au cœur de l’ancienne commune d’Annappes) a motivé la prescription d’un diagnostic archéologique surune surface de 41 m2. Cette dernière correspond à l’emmarchement de l’édifice hors-norme coulé d’un seul tenant en1921.La parcelle s’inscrit dans un contexte fortement anthropisé permettant l’identification d’occupations significativescouvrant l’âge du Bronze aux périodes contemporaines ; nous rappelons également l’exceptionnelle richessehistoriographique d’Annappes répertoriée dans le Brevium exempla (recueil de descriptions des domaines del’église et du fisc royal) indissociable des inventaires des biens et des comptes royaux de Charlemagne ainsi que desordonnances sur les fermes royales, dits capitulaire de Villis (règlement administratif qui contient les principes de lagestion et de l’économie domaniale ordonnée par le roi). Les intendants y ont décrit au tournant des VIIIe s./IXe s.le domaine royal qui deviendra simple curtis dans la seconde moitié du IXe s. ou au début du suivant. Il évoluera,ensuite, durant le Xe s. vers le statut de domaine comtal.Cette intervention avait pour objectif d’étoffer la reconnaissance du puissant fossé attribué à l’enceinte du domainecarolingien par un complément d’informations sur les aménagements mis en évidence en 2017 (Deflorenne etal. 2017). Ces derniers référaient à l’identification des installations liées au domaine carolingien ou encore auxoccupations satellites qui gravitent dans son environnement.L’emprise est située sur l’ancienne commune d’Annappes, au cœur de l’urbanisation, à l’altitude moyenne de 26,50 mIGN69. Elle se positionne sur le versant sud de la vallée du courant Maître David, en bordure de l’affleurement decraie qui occupe la partie méridionale de la commune et inscrit la limite nord du dôme du Mélantois. Le site est assissur des limons pléistocènes. Le relief est peu marqué et l’érosion naturelle n’est pas conséquente sur les vestiges.Sur l’ensemble de la parcelle, nous retrouvons le sommet de la séquence d’un luvisol, des dépôts de colmatage etdes comblements anthropisés associés au parcours du fossé domanial carolingien qui traverse l’emprise selon uneorientation est/ouest. Il recouvre neuf vestiges chronologiquement positionnés à partir du Haut-Empire (IIe s./première moitié du IIIe s. de notre ère) et au cours du haut Moyen Âge. Ces informations viennent conforter leshypothèses avancées sur le déploiement des occupations multiséculaires de ce terroir, soit pour ce diagnostic, celui del’occupation du Haut-Empire et du Moyen Âge vers l’église et la Maison Commune.Le fossé domanial à fond plat et parois largement évasées, d’une largeur estimée à 7 m pour une profondeur projetéeà 3,2 m, est accompagné d’une levée de terre qui octroient au lieu un caractère défensif imposant. Il se développeà 20 m au sud de la paroisse. Sa découverte en 2017 a accordé à l’espace une forte structuration qui ne dénotepas eu égard au contexte domanial alto-médiéval. Témoignage de l’une des enceintes des deux cours du complexeroyal matérialisé par des clôtures dans le Brevium exempla, le fossé contraint des aménagements et confirme unedes données issues des sources textuelles. Les éléments céramiques les plus anciens sont associés aux comblementsterminaux de cet ouvrage et font référence au plus tôt au XIe s. de l’ère.Au terme de cette intervention, la topographie de l’ancienne commune d’Annappes se voit complétée pour le hautMoyen Âge par un supplément d’information sur le tracé du fossé domanial et les recoupements chronologiques quil’affectent. Il emprise le sous-sol jusqu’à l’occupation antique qu’il recouvre. Héritage de la société médiévale, il sepositionne comme un élément structurant du domaine fiscal royal et permet de confronter et de croiser un tant soitpeu la réalité archéologique avec l’exceptionnel dossier documentaire de la commune.La remise en état du terrain a été assurée par la commune de Villeneuve d’Ascq. Les travaux de consolidation de lavoie de circulation (graviers préalables au revêtement enrobé) permettent la préservation des vestiges archéologiquesdécouverts avec un apport de terres.