Soignants, soignés et accompagnants en action pour « habiter » le couloir d’hospitalisation

Abstract

A l’occasion de cette journée d’étude, je souhaite présenter une approche relative au travail de recherche que je mène dans le cadre d’une thèse de doctorat en architecture et dont la soutenance est prévue fin 2020. Ce travail s’intéresse à l’hôpital du point de vue de la spatialité et du vécu quotidien de l’espace architectural et de l’organisation sociale et institutionnelle. Il s’agit d’appréhender les différents rapports à l’espace en fonction des actions et des acteurs, de leurs statuts, situations et des moments. Autrement dit, d’appréhender les spatialités individuelles qui modifient, de manière collective, l’hôpital tel qu’il est pensé par l’architecte pour en faire un espace d’actes. Cette approche permet la prise en compte des soignés, des soignants, des accompagnants comme acteurs ou agents de l’espace au lieu d’être simplement des individus, des usagers ou utilisateurs. Toutefois, comment ce statut influence-t-il la recherche ainsi que l’analyse de l’architecture normée et aseptisée de l’hôpital ? Sachant que l’espace n’est pas considéré ici comme une étendue abstraite mais comme « configuration temporairement stabilisée, créée et transformée par les actes » .L’hypothèse formulée consiste à prendre en compte les spécificités des acteurs en tant qu’habitants afin d’interroger les caractéristiques de l’habiter comme un « faire avec l’espace » et, de ce fait, d’appréhender ses conditions, ses manières et son impact sur l’hôpital et son devenir. Par conséquent, l’hôpital serait habité par les soignants et le personnel hospitalier, les soignés et les accompagnants qui, en y passant un moment de vie plus ou moins long, y inscrivent leurs pratiques et usages respectifs. Comment leurs actions transforment-elles l’espace hospitalier, son statut et sa signification ? Comment transforment-elles les expériences spatiales tout en constituant une ressource pour d’autres spatialités et actions ? Pour tenter de répondre à ces questions, l’exemple concret des couloirs des unités d’hospitalisation pédiatrique de l’hôpital Jeanne de Flandre de Lille sera interrogé. Ces couloirs montrent la manière dont des pratiques et stratégies sont mises en place en fonction des moments du jour et de la nuit et, comment des actes individuels organisés parfois de manière collective transforment le couloir en un lieu d’encombrement, de rencontres, de jeux, d’attente et de voisinage jusqu’à reconstruire l’espace de l’unité de soins. Les soignants, les parents et les enfants-soignés habiteraient ainsi le couloir tout en cohabitant entre eux et avec les mobilier, le matériel de soins et de jeux. Aussi, au lieu d’être un espace de circulation, le couloir deviendrait un lieu central propre à un groupe et à une unité de soins. Ce qui amène vers un questionnement plus large incluant la définition d’un couloir d’hôpital et son rôle spatial, aussi, remet en question la conception et la programmation actuelle de ce dernier d’un point de vue architectural (normes dimensionnelles et géométriques, maîtrise des flux, configuration, échelle,…).